Il existe deux époques majeures de la redécouverte de Guillaume de Saint-Thierry. Elles président ensemble à l’écriture d’une histoire des idées qui soutiennent les recherches sur l’homme et sa doctrine. Si le dialogue entre la théologie et la spiritualité constitue un centre de gravité explicatif remarquable dans ce domaine, la figure du moine reçoit moins d’honneurs aux côtés des qualités de théologien et de mystique ordinairement prêtées à Guillaume et qui nourrissent ces discussions. Or, dans la connaissance d’amour et l’aspiration de l’union à Dieu qui font l’âme de sa doctrine et sur laquelle se penchent les historiens se mêlent intimement deux expériences à interroger de concert : l’expérience théologale du Dieu révélé et celle de la vie régulière bénédictine ou cistercienne. De textes en textes se file ainsi l’économie d’un sens puissant qui rompt, dans la forme de ses énoncés et par l’entremise de la plasticité de définitions toujours contextuelles, avec des habitudes de pensée ancrées : l’opposition sans cesse reproduite entre théorie et pratique. Il y a ainsi un apprentissage de lecture à refaire, une finalité de l’écrit à retrouver, une tradition de pensée à restaurer. Sur cette base, que gouverne la notion de sagesse, l’influence des amitiés et inimitiés de Guillaume peut être déchiffrée, les équilibres en mouvement de sa doctrine peuvent révéler une coloration christologique plus soutenue, la psychologie de cet homme en chemin et sa vie spirituelle venir à la rencontre l’une de l’autre.